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Aïda, version intime

En mai, Aïda, le célébrissime opéra de Verdi, sera à l’affiche du Stadsschouwburg d’Anvers. Et ce sous la houlette de Franco Dragone, l’homme des spectacles du Cirque du Soleil. Le Louviérois a choisi de mettre en scène cette superbe histoire d’amour avec sobriété et élégance.

C’est avec Aïda que Franco Dragone s’est initié à l’opéra. Son galop d’essai remonte à quelques années, à la demande de l’opéra napolitain San Carlo.  » Travailler pour le San Carlo était un réel honneur, se souvient Franco Dragone. Ce sont les responsables de l’opéra qui ont choisi Aïda. D’une certaine façon, le fait qu’il s’agisse d’un opéra m’a facilité la tâche. J’étais tenu par le livret, la musique, l’histoire. Je n’ai pas eu à démarrer de zéro, comme c’est le cas pour un spectacle du Cirque du Soleil, par exemple. Mais j’ai pu apporter mes idées. Il va de soi que je n’ai pas touché à la musique. J’ai respecté l’oeuvre de Verdi de la première à la dernière note. Pour le récit, en revanche, c’était moins évident. Je dois avouer que cela ne me parlait pas trop. L’histoire comporte des aspects intéressants, tragiques, mais j’ai dû trouver un autre point de départ. « 

A travers le regard des gens

S’inspirant de l’actualité en général et de la question des réfugiés en particulier, Franco Dragone s’est demandé comment l’histoire était vécue non pas du point de vue des héros mais de celui des simples gens.  » Nous en sommes arrivés à créer des personnages supplémentaires, témoins des événements, avec un regard intéressant puisqu’il vient d’en bas. On se retrouvait ainsi avec deux niveaux de lecture : les héros de la grande histoire qui, outre leur rôle héroïque, vivent aussi une belle idylle, et les gens comme vous et moi qui sont témoins de tout cela, sont constamment présents mais auxquels les héros n’accordent même pas un regard. Ces gens ne font que subir le récit. « 

Une fois cet angle déterminé, plus rien n’a pu arrêter Franco Dragone.  » Cela m’a tout de suite donné l’idée des décors inspirés de l’architecture égyptienne dans une version détaillée et réaliste, ainsi que Verdi lui-même les avait voulus. Nous avons opté pour un décor symbolique, où les temples sont détruits et les façades sens dessus dessous. Tous ces éléments m’ont permis de me situer dans le récit. « 

Le spectaculaire cède la place à l'imaginaire pour que le spectateur puisse se concentrer sur le récit.
Le spectaculaire cède la place à l’imaginaire pour que le spectateur puisse se concentrer sur le récit.© L.ROMANO

Un spectacle minimaliste

Selon Franco Dragone, Aïda reste l’oeuvre la plus intime de Verdi.  » Certes, il y a la spectaculaire marche triomphale sur fond de pyramides, les centaines de soldats, les éléphants... Mais de nombreuses autres scènes se jouent derrière des portes closes et illustrent les sentiments des deux personnages principaux. Comme une sorte de zoom avant. Nous avons choisi de présenter la marche triomphale de manière symbolique : ni chars, ni éléphants, ni parade. Rien que le sang et les victimes de la guerre. On a remplacé le grand spectacle par les émotions. Cela nous a permis de relier cet opéra historique à l’actualité que nous vivons et aux atrocités qui ensanglantent notre époque. « 

Si le décor est spectaculaire, il a le bon goût de laisser place à l’imagination des spectateurs qui ne manqueront pas d’être touchés par ce récit intemporel. Les costumes ne jouent pas davantage la carte du péplum et se contentent de symboliser la hiérarchisation des personnages.  » La tâche des chanteurs n’en est que plus importante. On a exigé d’eux bien plus qu’une belle voix. Ils doivent aussi avoir des talents d’acteurs, interpréter pleinement les personnages et avoir une présence physique sur scène pour être crédibles.  » Un orchestre symphonique live, des solistes de haut vol, le génie de Giuseppe Verdi et les multiples talents de Franco Dragone... tout cela nous vaut un spectacle à ne surtout pas manquer.

Infos : Aïda de Verdi. A voir du 11 au 14 mai, au Stadsschouwburg d’Anvers. Représentations à 15 h et à 20 h. Prix : 39,90 ? et 54,90 ?. www.stadsschouwburg-antwerpen.be

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