Os à moelle, sauce romaine et hydromel © Nicolas Evrard

L’assiette à voyager dans le temps

A la fois restaurant et centre de recherche historique, l’archéorestaurant de Ramioul propose aux gourmands de découvrir 2.000 ans de gastronomie, du  » garum  » de l’Empire romain aux desserts de Versailles, en passant par les recettes des mille et une nuits.

Récemment ouvert et intégré au Préhistomuséum de Ramioul (voir encadré), l’Archéorestaurant offre un concept inédit en Europe : la carte de ce restaurant n’est en effet composée que de plats dont raffolaient les hommes d’autrefois, qu’il s’agisse de nantis romains, d’un calife badgadi ou d’un Prince-Evêque liégeois du XVIe siècle. Des recettes authentiques, tirées d’ouvrages d’époque et minutieusement reconstituées par Pierre Leclercq, historien spécialiste de la gastronomie.

Avec, à la clé, de belles surprises pour les papilles de ceux qui poussent la porte de l’établissement... « C’est que l’évolution de la gastronomie n’est pas linéaire, explique d’emblée Pierre Leclercq. On croit souvent que la cuisine a lentement évolué, des repas les plus frustres du paléolithique aux plats délicats et subtils d’aujourd’hui. C’est faux: à plusieurs reprises dans l’histoire et dans de nombreuses sociétés, la gastronomie a atteint un très haut niveau de sophistication. Et si certaines techniques, certaines saveurs semblent revenir à plusieurs reprises, elles s’inscrivent à chaque fois dans un contexte culturel complètement différent.« 

Ca s’en va et ça revient

C’est notamment le cas de l’aigre-doux, plébiscité par les Romains puis par la gastronomie médiévale. Chaque époque garde toutefois sa spécificité : « Les Romains raffolaient par exemple de garum, une sauce à base de poisson fermenté qui tombera par la suite en désuétude; ils adoraient aussi parfumer leurs plats grâce à une plante à l’odeur forte, la ferula assa-foetida. On retrouvera cette plante dans la cuisine médiévale moyen-orientale, via l’influence byzantine, mais pas en Occident. Dans nos régions, cette herbe sera détestée par les Francs et sera abandonnée en cuisine ; on préfèrera par exemple napper les plats de verjus, un jus de raisin immature« .

Autruche à la sauce aux dattes
Autruche à la sauce aux dattes© Nicolas Evrard
Côtelette d'agneau sauce jurvert
Côtelette d’agneau sauce jurvert© Nicolas Evrard
Profiteroles à la coriandre
Profiteroles à la coriandre© Nicolas Evrard

Afin d’illustrer ces différences, la carte de l’archéorestaurant offre une belle diversité de plats et d’époques : autruche à la sauce aux dattes (recette romaine) , Samak Mashwi (poisson rôti selon une recette du XIIIe siècle originaire de Bagdad) à l’eau de rose, côtelettes d’agneau sauce jurvert (à la sauge), profiteroles à la coriandre du XVIIe... En bouche, tous ces plats hauts en saveurs déconcertent et surprennent parfois par leur étonnante modernité. « Pourtant, il s’agit bien des recettes originales, elles n’ont pas été adaptées. Mais nous avons bien évidemment sélectionné les plats de la carte suivant leur intérêt... Toutes les recettes du passé ne sont pas aussi originales ! »

Le contenu et le contenant

Et pour que l’expérience soit complète, ces mets se dégustent grâce à des reproductions modernes de vaisselle ancienne : fourchette à deux dents (qui ne sert qu’à piquer !), cuiller copie d’une originale anglaise du XVIe siècle, verres soufflés à l’ancienne, pots en terre cuite...

Reste qu’il serait dommage de faire bonne chère sans comprendre dans quel contexte culturel et historique s’inscrivent les recettes proposées. Raison pour laquelle Pierre Leclercq, véritable encyclopédie vivante, parcourt la salle pour présenter les plats et répondre aux éventuelles questions des gourmands curieux. De quoi se remplir l’esprit... en plus de l’estomac ! Et, si le coeur vous en dit, vous pourrez même repartir chez vous avec l’une ou l’autre recette sous le bras...

L’Archéo-restaurant, 128 rue de la Grotte, 4400 Flémalle. Ouvert du mercredi au dimanche en journée, en soirée uniquement le vendredi et le samedi. Uniquement sur réservation au 04 228 97 61. En journée, accès via le parc du Préhistomuseum (prix de l’entrée décompté de l’addition). http://www.prehisto.museum/archeorestaurant/

Un préhistomuseum flambant neuf

Entièrement rénové et ouvert au public début 2016, le Préhistomuseum offre une expérience cuturelle tournant autour de la préhistoire, de l’archéologie et de la nature/écologie. Sur une superficie de 30 ha et supervisé par des archéologues, le site propose quantité d’activités et d’ateliers : « chasse » à l’arc, archéologie expérimentale, champ de fouille, parcours pied nus, labyrinthe végétal, visite de la grotte Ramioul – dans laquelle ont été découverts de nombreux vestiges préhistoriques – à la lampe de poche... « Il y a bien évidemment un espace muséal à proprement parler, explique Fernand Collin, directeur du préhistomuseum, mais tout a été fait pour contenter aussi ceux qui n’aiment pas les musées : ils pourront découvrir des activités amusantes et en retirer tout de même des informations, distillées un peu partout « .

Infos pratiques : http://www.prehisto.museum

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