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Psycho: se plaindre, ça fait tellement de bien!

Se plaindre des embouteillages, de la météo ou de notre patron, ça fait un bien fou ! Surtout quand on trouve une oreille compatissante. Mais point trop n’en faut... Voici donc comment se plaindre sans exagérer, tout en apprenant à porter un autre regard sur ce qui nous contrarie.

Je plaide coupable. Je suis de celles qui se plaignent volontiers de tout ce qui les énerve. Et les occasions ne manquent pas car ma vie n’est pas parfaite. Pas plus que le monde dans lequel je vis d’ailleurs... Voir d’emblée le bon côté des choses n’a rien d’évident. Pourtant, ce n’est pas mission impossible. Prenez les embouteillages quotidiens. On y perd des heures qu’on pourrait consacrer à autre chose. Comme on ne peut pas y couper, autant les considérer autrement. Comme un moment pour soi, un sas entre le boulot et la maison. Profitons-en pour écouter de la musique et nous vider la tête, sans devoir penser à organiser ou planifier autre chose. Depuis que j’ai adopté cet état d’esprit, les embouteillages me semblent curieusement moins longs.

Le trafic, la météo et les ordinateurs récalcitrants. C’est le top 3 de nos sources de plaintes.

On se plaint trop

 » Le trafic, la météo et l’ordinateur qui ne fonctionne pas... Tel est le top 3 des sujets dont on se plaint, constate Greet van Hecke, coach en pensée positive, l’une des initiatrices de l’action ludique 30 jours sans se plaindre, qui a réussi à convaincre 32.000 personnes de jeter un regard positif sur le quotidien pendant un mois (du 15/01 au 14/02). Car c’est bien de cela qu’il s’agit : non pas ravaler ses frustrations mais apprendre à voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide.  » Nous nous plaignons, en effet, beaucoup trop, insiste Greet Van Hecke. Lorsque cela devient systématique, c’est un problème. Je pensais que c’était typique de la Belgique ou du Nord de l’Europe, car des études ont démontré que plus on va vers le nord, moins on est satisfait. Mais j’ai reçu des réactions extrêmement enthousiastes de France et d’Espagne, où il semblerait que se plaindre soit également un sport national. « 

Vera Smets: « J’ai appris à voir la vie autrement »

Psycho: se plaindre, ça fait tellement de bien!
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« Avant, j’étais championne pour me plaindre de tout et n’importe quoi. Au fil du temps, j’ai appris à voir la vie autrement. Je dépensais trop souvent mon d’énergie pour des choses négatives. Aujourd’hui, j’essaie de me concentrer sur ce qui va. Quand mon mari a fait des courses, je ne me plains plus parce qu’il a oublié d’acheter certaines choses. Je le remercie de m’avoir évité la corvée du supermarché. Ce qui m’aide aussi ? Rester immobile 5 minutes, les yeux fermés, en me concentrant sur ma respiration. Je me coupe alors volontairement de tout stimulus. Et ma journée se passe nettement mieux. Faire de la marche en forêt quatre fois par semaine, m’aide aussi. »

Nous qui évoluons dans une société d’abondance, sommes-nous devenus trop gâtés ou trop exigeants ?  » Non, je pense que la nature humaine est ainsi faite, répond Greet Van Hecke. C’est une donnée de l’évolution. Un certain négativisme est ancré en nous. Nous avons pris l’habitude de remarquer ce qui ne va pas plutôt que ce qui va. Cela remonte à l’époque de Néanderthal, quand il fallait détecter rapidement un prédateur ou un aliment dangereux. Il s’agissait d’une stratégie de survie. « 

Ce trait de caractère a-t-il encore un sens aujourd’hui ? En nous concentrant sur ce qui ne va pas, sans doute espérons-nous améliorer les choses.  » Attention, positiver ne signifiepas être naïf, nuance la coach. Il faut pouvoir nommer le problème. Mais on doit aussitôt se poser la question Que puis-je y faire ? Si la réponse est rien, il faut cesser de se plaindrer. Exemple typique : la météo tristounette. Tout ce qu’on peut faire, c’est s’acheter un billet pour une destination ensoleillée. A défaut, on tente d’oublier.

Mais tout le monde n’a pas les mêmes aptitudes à positiver.  » Notre façon de voir le monde est innée pour environ 50 %. 10 % dépendent des circonstances car certains subissent, en effet, plus de coups durs ou de contretemps que d’autres. Quant aux 40 % restants, ils ne tiennent qu’à nous. De ce côté-là, j’ai de la chance : je jouis d’une nature optimiste ! Je suis née comme ça et j’en ai fait ma profession. Quand le pessimisme menace de prendre le dessus, j’écoute de la musique, je vois des amis. Et cela m’aide beaucoup. « 

Se plaindre peut aussi être utile

 » Je ne dis pas qu’il faut cesser de se plaindre, souligne Patrick Luyten, psychologue. Le besoin de se plaindre est un phénomène humain complexe. C’est avant tout un moyen de communication qui a une fonction sociale importante : on cherche ainsi du soutien et de la compréhension. On vide son sac, cela fait du bien, c’est une façon de créer le terreau d’un lien social. Celui qui se plaint cherche à s’attirer l’empathie. C’est une façon de réguler les émotions et de remettre les choses en place.

L’homme s’est toujours plaint, c’est un animal relationnel. Or, il n’y a pas de relation dans laquelle on ne se plaint pas. Le simple fait de se plaindre de la météo peut avoir son utilité, pour amorcer une conversation, par exemple. Cela contribue au partage des émotions, y compris négatives. «  On peut donc se plaindre de temps à autre. Le tout, c’est d’en être conscient. Quand cela devient une seconde nature, la fonction et l’utilité disparaissent. Cela ne soulage plus et ne renforce plus aucun lien. Au contraire, ça pourrit la relation. Résulat, on tombe dans un cercle vicieux. Car les gens se détournent de ceux qui se plaignent tout le temps. Du coup, ils se sentent encore plus mal et se plaignent d’autant plus.

Christa Claessens: « Je porte un autre regard sur ce qui m’irrite »

Psycho: se plaindre, ça fait tellement de bien!

« Quand je me plains, c’est en mon for intérieur. Il est beaucoup plus rare que je me lamente en public. Ce qui m’énerve surtout ? Les gens qui ne répondent pas à mes attentes ou qui ne respectent pas leur parole. Je m’accorde quelques secondes pour me plaindre, après quoi je m’efforce de passer à autre chose. Ma stratégie consiste à m’adresser à moi et à moi seule, et à être consciente de ce qui m’irrite. Il est crucial de pouvoir jeter un autre regard sur ce qui nous exaspère. Je déteste faire les courses, alors je me dis : j’ai la possibilité de faire des courses, de choisir ce que je vais acheter, et ça, c’est un vrai luxe ! »

 » Quand se plaindre devient un automatisme, il faut bien plus que quelques astuces ou une campagne ludique pour s’en sortir, analyse Patrick Luyten. C’est le signe qu’on souffre sans doute d’une insatisfaction profondément ancrée. Mon conseil ? Se faire aider par un professionnel. Les trucs et astuces ne conviennent qu’à ceux qui sont conscients de leur comportement et qui ont envie de changer. C’est d’ailleurs valable pour tous les problèmes : la clef est d’en prendre conscience. Tout comportement humain peut en effet être corrigé.

On ne part pas tous égaux en matière de vision positive. L’hérédité compte à hauteur d’environ 50 %. Cela varie chez chacun de nous. En revanche, il n’y a aucune raison de croire que nous serions programmés pour être pessimistes. Il existe dans le cerveau des centres responsables du stress et du danger, alors que d’autres contrôlent le plaisir et le désir. Et il peut évidemment arriver que leur équilibre soit rompu.

Il m’arrive aussi de me plaindre, et j’aime ça, avoue le psychologue. Le manque de lumière agit sur mon humeur. Ce n’est pas très grave. Dans une certaine mesure, se plaindre peut faire du bien. Et en ce qui me concerne, cette mesure est plutôt généreuse ! « 

Trucs pour moins se plaindre

– Pendant 21 jours d’affilée, le soir, efforcez-vous de coucher sur papier 3 expériences positives. Au début, vous devrez chercher mais, à la longue, ce sera plus facile. Vous prendrez l’habitude de focaliser sur ce qui va.

– Bannissez le mot  » mais « .  » C’est pas pour me plaindre mais.... « ,  » Je ne suis pas raciste mais... ». De toute façon, vous ne pensez pas sérieusement ce qui précède ce  » mais « .

– Ne recherchez pas la compagnie de ceux qui se plaignent, c’est une attitude contagieuse.

– Pendant un mois, coloriez sur un calendrier les jours positifs et les jours négatifs. Faites ensuite les comptes, vous serez agréablement surpris...

– Remplacez  » je dois  » par  » je vais « . Je vais remplir ma déclaration d’impôts au lieu de je dois remplir ma déclaration d’impôts. Cela change tout...

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