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Des oeufs et du plasma pour soigner les plaies chroniques ?

Pour soigner les plaies chroniques, des chercheurs testent un traitement à base de plasma froid aux Pays-Bas et à base de... coquille d’oeuf en Norvège !

Les plaies chroniques sont douloureuses et les patients qui en présentent ne peuvent pas se mouvoir librement. On estime que 20 millions de personnes sont concernées dans le monde. Comme il s’agit souvent de personnes d’un certain âge, les cas augmentent à cause du vieillissement de la population. Les diabétiques font également partie de la population à risque : 15 à 25 % d’entre eux ont des plaies chroniques aux pieds, ce qu’on appelle la plaie du pied diabétique. Mais la plupart des blessures chroniques sont en fait des escarres aux fesses et aux talons (80 % de l’ensemble des cas), et des ulcères aux jambes. Une plaie chronique est une affection grave : il n’est pas rare, en effet, qu’une blessure non (ou mal) soignée finisse par provoquer l’amputation du membre atteint.

Le traitement des plaies chroniques prend du temps et la guérison n’est pas toujours au rendez-vous. Elle n’intervient que dans un cas sur deux. Les médecins ont coutume de prescrire des antibiotiques et les patients doivent éviter toute pression sur la plaie, ce qui signifie souvent qu’ils sont confinés assis ou couchés. C’est dire si la demande est grande pour un traitement ou un médicament réellement efficace ! Or, deux méthodes toutes récentes semblent fort prometteuses.

Le plasma froid

À Eindhoven, aux Pays-Bas, des chercheurs liés à l’entreprise Plasmacure, ont développé, en collaboration avec des médecins et l’Université technique de la ville, un pansement à base de plasma froid.  » Ce plasma froid (un gaz à haute énergie contenant des particules chargées, appelées ions) est intégré dans le pansement qu’on colle sur la plaie, détaille Bas Zeper, directeur général. Ce pansement est équipé d’un petit fil électrique. D’une simple pression sur un bouton déclenchant une décharge de gaz, du plasma froid tue les bactéries pathogènes contenues dans la plaie. Le plasma froid stimule aussi la croissance cellulaire et améliore le flux sanguin. « 

Un pansement à base de plasma froid.
Un pansement à base de plasma froid.

Le traitement est indolore et ne demande qu’une minute par séance. Cet été, le VU Medisch Centrum d’Amsterdam a testé ce dispositif en conditions réelles, sur 20 patients diabétiques de 60 ans et plus.  » Nous avons choisi ce groupe, parce que, de toutes les blessures chroniques, la plus difficile à traiter est la plaie du pied diabétique, explique Bas Zeper. Parce que ces patients ont en permanence trop de sucre dans le sang. Nous avons pu démontrer que le traitement est indolore et dénué d’effets secondaires. En outre, les plaies de certains patients avaient guéri en deux ou trois semaines.  » Selon Bas Zeper, l’avantage du traitement au plasma froid est de parvenir à détruire toutes les bactéries pathogènes, même celles résistant aux antibiotiques.

A l’heure actuelle, ce pansement fait l’objet de tests par des spécialistes. Mais, d’ici peu, les patients pourront l’utiliser, chez eux.  » Il s’agit d’un traitement très simple. Seul un bouton est relié au pansement. Il n’y a pas de risque d’erreur ! «  se réjouit Bas Zeper. Le pansement sera lancé sur le marché en 2020.

La coquille d’oeuf

Un autre traitement contre les plaies chroniques nous vient de Norvège. Il s’agit d’un bandage fabriqué avec la très fine membrane située à l’intérieur de la coquille d’un oeuf de poule. Les bienfaits médicamenteux de cette pellicule sont connus depuis des siècles, notamment en médecine orientale. Mais cet extrait d’oeuf n’avait encore jamais fait l’objet d’une étude scientifique sur son application à grande échelle. La société norvégienne de biotechnologies Biovotec fait donc oeuvre pionnière, en collaboration avec l’institut de recherche Nofima.

 » Pendant nos recherches en laboratoire, nous avons repéré dans la fine membrane à l’intérieur de l’oeuf des cellules capables d’améliorer la régénération des structures moléculaires autour d’une plaie, précise Ralf Schmidt, CEO de Biovotec. Les Chinois avaient donc raison. En soi, il était logique que cette membrane contienne ce type de cellules. Dans un oeuf, les deux membranes se situent autour du blanc. Leur rôle est de protéger la partie interne dans laquelle le poussin grandit d’un éventuel assaut de bactéries venues de l’extérieur. Attention, cela ne veut pas dire qu’elles sont capables de guérir des plaies. Mais nos recherches en laboratoire et nos tests menés sur des rats diabétiques ont été si prometteurs que nous avons d’ores et déjà pu appliquer cette technique sur des patients. « 

Ce nouveau type de pansement ne ressemble pas à un bandage classique. Il se compose d’un film transparent en cellulose – qui assure l’environnement propice à la guérison – et des actifs issus de la membrane de l’oeuf. Lorsqu’on l’applique sur la plaie, ce pansement se transforme en une sorte de gel qui agit pendant deux à quatre jours. Au bout de cinq à huit traitements successifs, si tout va bien, la plaie est guérie.

Qu’est-ce qu’une plaie chronique ?

Une plaie est dite chronique dès qu’elle dure plus de huit semaines et qu’elle ne montre aucun signe de cicatrisation sur cette période. Ce sont des plaies souvent purulentes et malodorantes. Les causes des plaies chroniques sont diverses : du diabète aux maladies vasculaires, à l’origine d’une mauvaise circulation sanguine et donc d’une mauvaise oxygénation et une oxydation des tissus, en passant par les infections localisées et l’état nutritionnel du patient.

Bien que très fine et transparente, la membrane d’oeuf est très résistante, du fait qu’elle est en partie constituée de kératine, une protéine constitutive des cheveux et des ongles. Dans l’industrie alimentaire – qui fait usage d’oeufs pour la confection de croquettes, de lasagnes ou de crème glacée – les membranes finissent le plus souvent au rebut, comme les coquilles d’oeufs elles-mêmes. Une partie de la recherche norvégienne se penche sur la collecte et le traitement des déchets d’oeufs.

 » Pour cela, nous avons travaillé en collaboration avec un géant de l’alimentaire qui collecte des membranes d’oeufs pour nous, poursuit Ralf Schmidt. L’hygiène est un point essentiel à respecter. Car les coquilles d’oeufs sont souvent couvertes de bactéries et peuvent parfois contenir des salmonelles. C’est pourquoi, juste après que les membranes aient été séparées des coquilles d’oeufs, elles sont nettoyées et moulues. Les principes actifs sont extraits de cette poudre par filtrage, puis traités. « 

Le bandage à base de coquille d’oeuf devrait être disponible pour le grand public en même temps que la compresse au plasma froid, soit en 2020. Tous deux promettent d’améliorer notablement le traitement des plaies chroniques, au point que les amputations devraient enfin se conjuguer au passé et les patients être remis sur pied bien plus vite.

IMCO LANTING

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